dim 22/05/2022 - 07:52

Accord d’Arusha et droits de l’homme: une promesse non-tenue?

Résumé

Près de vingt ans après et malgré le débat contradictoire à son sujet, l’Accord d’Arusha (l’A.A.) reste un texte fondamental dans la consolidation de la paix et la cohésion sociale au Burundi. Conclu en 2000 et ayant pour finalité de mettre fin à la guerre civile, l’A.A. institua la transition et assura la base aux institutions de la période post-transition. Or, avec un tel projet, l’A.A. ne pouvait pas ignorer l’importante tâche des droits de la personne humaine dans la construction des institutions démocratiques et sociales stables.

Cet article pose un regard rétrospectif et critique sur le rôle et la place des droits de l’homme dans l’A.A., et ce en trois points. Premièrement, il explore l’émergence des droits de l’homme et leur rôle dans la légitimation des institutions politiques, et puis il examine leur source dans le droit international et leur statut dans la constitution du Burundi. En deuxième lieu, l’article s’interroge sur l’efficacité de ces droits depuis la signature de l’A.A. En troisième lieu, il explore et propose une synergie d’acteurs pour plus d’effectivité dans la mise en place des institutions respectueuses des droits de la personne humaine. L’article termine par un regard rapide sur le rapport entre «droits de l’homme et bonne gouvernance», comme l’A.A. en parle au Protocole II intitulé : ‘‘Démocratie et Bonne gouvernance’’.

Mots clés: droits de l’homme; Accord d’Arusha; paradigmes des droits de l’homme; synergie; bonne gouvernance

Abstract

Almost twenty years after and despite the contradictory debate on its account, the Arusha Agreement (A.A.) remains a fundamental text in the consolidation of peace and social cohesion in Burundi. Concluded in 2000 with the goal of ending the civil war, the A.A. instituted the transition and secured the post-transitional institutions. And with such a project, the A.A. could not ignore the important task of human rights in setting up stable and democratic political and social institutions. 

Thus, this article looks back critically at the role and place of human rights in the A.A., and it does so through three points. First, it explores the emergence of human rights and their legitimating role of political institutions, and analyzes their source in the international human rights law and their status in the constitution of Burundi. The second point examines the efficacy of human rights since the signature of the Arusha Agreement. In the third place, the article explores and suggests a network of actors for more effects in setting up and sustaining institutions that respect human rights. The article is concluded by a quick look at the relationship between “human rights and good governance,” as the A.A. mentions human rights in the second Protocol entitled “Democracy and Good Governance.”

Key words: human rights; Arusha Agreement; paradigms of human rights; network; good governance. 

Introduction

Plus de quinze ans viennent de s’écouler après la signature de l’Accord d’Arusha censé ramener la paix, la sécurité et la réconciliation au Burundi. Quoiqu’une telle période paraisse courte pour exiger une évaluation, un regard rétrospectif  sur ce qui en était réalisé ou non s’avère indispensable. Un tel projet, toutefois, serait gigantesque pour une seule étude. C’est ainsi que l’objet de cet essai est de voir la place des droits de l’homme dans l’Accord d’Arusha et son rôle dans la consolidation d’une société burundaise paisible et réconciliée avec elle-même. 

L’Accord d’Arusha est donc un accord politique résultant des conflits socio-politiques endémiques. Il a pour visée principale la construction d’une véritable société politique et démocratique gouvernée dans le strict respect des droits de l’homme et la non violation des libertés fondamentales afin d’éviter les crises répétitives que le Burundi a connues ces dernières décennies. C’est la raison pour laquelle, dans le Protocole II, article 3 inscrits au chapitre qui pose les fondements de la constitution post-transition, l’Accord d’Arusha s’occupe de la démocratie/bonne gouvernance et de ce qui en constitue la quintessence : les droits de l’homme. 

Dans les lignes qui suivent, il sera question d’examiner la source de ces droits en termes du droit international des droits de l’homme et de leur statut constitutionnel au Burundi. C’est après cet examen que nous pourrons nous interroger sur leur efficacité et effectivité durant ces quelques années de vie de l’accord d’Arusha, afin d’en suggérer quelques nouvelles pistes si le résultat n’est pas satisfaisant. Nous conclurons par une interrogation sur le rapport entre droits de l’homme et bonne gouvernance, comme le chapitre qui les inclut porte ce titre. Mais avant tout, voyons l’émergence des droits de l’homme dans le droit international et son rôle dans l’édification de l’Etat moderne.

  1. Etat moderne et droits de l’homme contemporains

Il est souvent admis que le concept des droits de l’homme est aussi vieux que la société humaine elle-même. En guise d’exemple, la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme du Burundi (CNIDH) fait remarquer que « la doctrine considérant le genre humain comme source de légitimité naturelle opposable à la pesanteur des systèmes politiques, croyances religieuses ou barrières socioculturelles liberticides remonte de l’antiquité (3000 av. J.-C. -476) ». (CNIDH 2012:11). C’est la même position pour Paul Lauren et d’autres chercheurs qui affirment que la notion des droits de l’homme se retrouve dans toutes les sociétés parce qu’elle vient pour contrer les injustices sociales. (Lauren 1998:1 ; Ishay 2004:15-6 ; Maritain 1949:260). A se fier à cette lecture de l’histoire des droits de l’homme qui voudrait trouver leur origine partout, force serait de conclure que les droits de l’homme dont nous parlons aujourd’hui n’ont rien apporté de nouveau. 

Cependant, ces mêmes droits qui sont supposés trouver origine partout, rencontrent une opposition farouche aussi bien morale que politique. Aussi y a-t-il lieu de se demander si la conception actuelle des droits de l’homme n’apporte pas, en quelque sorte, un autre concept qui était absent dans l’histoire propre à chaque  société, où parfois, pour reprendre l’expression de la CNIDH, une forte opposition de certaines pratiques aux lois « liberticides » est très remarquable. Et de fait, le régime actuel des droits de l’homme ne peut être entièrement assimilé à ce qui se pratiquait dans d’autres communautés, parce qu’il prend origine dans le monde occidental. Comme dirait Ishay, la conception moderne des droits de l’homme est originairement européenne, indépendamment de là où ils sont évoqués. Conséquemment, ils sont marqués par la culture politique, économique, sociale et technologique de l’Occident. (Ishay 2004 :65). C’est une différence essentielle entre les droits de l’homme qu’on peut reconstituer dans les différentes sociétés à différentes périodes de l’histoire, et le régime actuel des droits de l’homme. C’est ainsi que cette origine des droits de l’homme en est même l’origine de leur contestation par les cultures non-occidentales, les accusant de véhiculer l’impérialisme occidental et de poursuivre le néocolonialisme

Sans pour autant engager une discussion en profondeur sur ces critiques, il faut cependant nuancer entre la conception moderne et le régime contemporain des droits de l’homme. En effet, le concept des droits de l’homme moderne s’émancipe du droit naturel qui avait permis l’émergence du sujet de droit mais toujours en conjonction avec les devoirs. Ainsi, les droits de l’homme modernes sont essentiellement les droits naturels non conditionnés par les devoirs. Ils sont ces droits que l’être humain possède en sa qualité d’être humain, indépendamment des obligations sociales ou autres. Ainsi, l’expression elle-même est très récente dans l’histoire des droits de l’homme, ayant été employé pour la première fois par Jean-Jacques Rousseau en 1762, (Hunt 2007:23), alors que l’expression « droits naturels » était familier aux philosophes et théoriciens politiques de la période moderne (Hobbes, Locke, Pufendorf, Grotius, etc.). (Beitz 2009:51). Selon Hunt, trois qualités formaient le contenu de cette expression « droits de l’homme » : naturalité (ils sont inhérents à tout être humain) ; universalité (valides partout) et égalité (les mêmes pour tous). (Hunt 2007:20).

Ce changement de paradigme des droits naturels aux droits de l’homme apporta des conséquences politiques et morales, parce que cette fois-ci, les droits de l’homme désignent un outil politique pour résister à l’oppression et limiter l’autorité. Ils ont mis en place des limites à ne pas dépasser et des standards à atteindre. Ils ont permis la conscientisation sociale des droits et offert l’outil de contestation contre leur violation. Hunt, une fois de plus, le dit bien : naturalité, égalité et universalité ne sont plus suffisantes; les droits de l’homme trouvent leur achèvement dans leur contenu politique. En effet, ils ne sont pas des droits de l’homme à l’état de nature, mais plutôt de l’homme en tant qu’être social. Ces droits ne sont pas opposés aux droits divins ou aux droits des animaux ; ils sont plutôt les droits de l’homme vis-à-vis de l’autre. (Hunt 2007:21). C’est ainsi que ces droits sont énoncés dans des Déclarations, parce qu’il s’agit de les faire connaître au public et de les justifier publiquement. En même temps que ces droits protègent l’individu contre les sources de leur violation, ils sont aussi la source de contestation politique et de justification institutionnelle. 

Ainsi, une fois intégrés dans le domaine politique, les droits de l’homme, même à cette période, jouent le rôle de légitimation des institutions politiques. Les penseurs modernes du politique conditionnent la légitimité de l’ordre institutionnel par le respect de ces droits. Leur violation constitue la désintégration de la communauté politique, (Locke 1993), et une raison morale suffisante pour les protéger. (Grotius 2005). Les auteurs de ces actes affirmaient des droits qui existaient déjà et qui étaient par conséquent, indiscutables. Ce faisant, ils inauguraient une révolution dans la souveraineté et créaient une base nouvelle pour les gouvernements qui, désormais, se justifieront par leur capacité de garantir ces droits universels. (Hunt 2007:116).

Il y a, néanmoins, une différence entre le concept moderne des droits de l’homme et leur sens contemporain. En effet, que ce soit la Magna Carta, the Bill of Rights, la déclaration américaine de l’indépendance ou la déclaration française des droits de l’homme et du citoyen, toutes étaient des déclarations nationales sans prétention de s’imposer sur tout le genre humain.

C’est pourquoi même l’universalité énoncée était en fait une universalité limitée par la territorialité de l’entité politique des auteurs de ces déclarations. Aussi la Magna Carta ou the Bill of Rights n’ont-ils pas suffi à constituer une plateforme politique pour les colons américains, pas plus que la déclaration américaine de l’indépendance n’aura été la base pour les Français dans l’initiation de leur révolution. Tout au plus, les déclarations antérieures auraient constitué une inspiration pour celles qui vinrent après, mais en aucun cas n’auraient-elles prétendues avoir une validité au-delà des frontières nationales qui les avaient vues naître. Cette limite territoriale de la validité normative des droits de l’homme modernes marque une première différence essentielle avec les droits de l’homme contemporains. 

Par droits de l’homme contemporains, j’entends, à la suite de la distinction qu’établit  Upendra Baxi, le mouvement des droits de l’homme initié avec la fin de la deuxième guerre mondiale, alors que les droits de l’homme moderne seraient ceux développés dans le siècle des lumières. Cette distinction est hautement utile parce que, non seulement elle souligne une séparation historique, mais aussi elle marque une différenciation normative. En effet, l’universalité des droits de l’homme moderne n’est pas simplement limitée par sa validité territoriale ; elle l’est aussi de par les sujets de ces droits énoncés et de leur inspiration idéologique. Ils sont essentiellement libéraux, et cet « homme » possédant des droits est l’homme blanc adulte, possédant la raison et la volonté. Dans ce sens, le paradigme moderne des droits de l’homme opère sur un modèle d’exclusion alors que le paradigme contemporain est plutôt inclusif (Baxi 2006:42).  Cette inclusion saute aux yeux quand on lit les instruments internationaux des droits de l’homme où l’exclusion est bannie d’office (DUDH art.2). En outre, quoique venant de l’Occident, les droits de l’homme contemporains admettent plusieurs sources de justification et réclament plusieurs origines idéologiques. En effet, leur objectif est moins l’unicité justificatrice que l’orientation de l’action, comme il sied à toute norme pratique. 

Ces traits distinctifs entre les paradigmes moderne et contemporain des droits de l’homme font que le régime actuel des droits de l’homme a introduit une nouvelle donne dans les relations et droits internationaux. Non seulement a-t-il conservé le rôle de légitimation des gouvernements, mais plus encore, il constitue la base de légitimation de la communauté internationale contemporaine qui, en rejetant de se construire sur le fait de la guerre, a professé sa foi dans les droits de l’homme comme fondement d’un monde paisible, ainsi que l’atteste la charte des Nations-Unies de 1945. Les droits de l’homme contemporains jouent simultanément ce double rôle. D’une part, l’Etat moderne de l’après la deuxième guerre mondiale ne peut pas être reconnue s’il nie les droits de l’homme des citoyens, parce que cela risque de déstabiliser la paix et la sécurité. C’est pourquoi pour les auteurs comme John Rawls, les droits de l’homme limitent la souveraineté des Etats et offre une justification morale à la communauté internationale pour intervenir dans un Etat qui commet des violations massives des droits de l’homme. (Rawls 1999). D’autre part, les droits de l’homme donnent une base morale à la communauté internationale pour mener une action concertée et consensuelle, alors qu’elle est culturellement diversifiée. Ainsi pour Habermas, dans une situation si volatile, les droits de l’homme sont la seule base reconnue pour la politique de la communauté internationale. (Habermas 2001:119). Mais au-delà de ce rôle politique que jouent les droits de l’homme, ils gardent surtout la dimension émancipatrice qui anime toute l’histoire des droits de l’homme, puisqu’ils sont toujours évoqués dans une situation d’oppression et de violations de ces droits, soit par un individu, soit par un groupe d’individus. Ainsi, la problématique des droits de l’homme dans le cadre de l’Accord d’Arusha se pose aussi bien en termes de légitimation politique de l’Etat et de la communauté internationale que comme une base d’émancipation du citoyen burundais.

  1. Accord d’Arusha et droits de l’homme

Comme déjà mentionné, le paradigme contemporain des droits de l’homme commence après la deuxième guerre mondiale et il est inscrit dans le fondement d’une nouvelle ère de la communauté internationale. Les droits de l’homme sont liés à la paix et à la sécurité de la communauté internationale, et c’est pourquoi ils acquièrent un statut légal à travers pactes et conventions qui donnent naissance au droit international des droits de l’homme. Ainsi, le noyau des textes qui fondent ces droits sont : la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme ; le Pacte international relatif aux droits civiques et politiques ; le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ; la convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination des femmes, et la convention sur les droits des enfants. Ce droit international a été régionalement réapproprié. Aussi trouve-t-on des chartes régionales des droits de l’homme, et dans le cas africain, il y a la charte africaine des droits de l’homme et des peuples. Quelle place occupent ces textes dans l’Accord d’Arusha ? Quel rôle y jouent-ils? 

Notons, avant de débattre ces questions, que l’Accord d’Arusha est composé de cinq protocoles. Le premier analyse la nature du conflit burundais, le problème de génocide et d’exclusion et propose des solutions, le deuxième s’occupe de la démocratie et de la bonne gouvernance, le troisième parle de paix et sécurité, le quatrième s’intéresse à la reconstruction et au développement, le cinquième se focalise sur les garanties pour l’application de l’accord. Les droits de l’homme sont déjà évoqués dans l’introduction où les signataires de l’Accord soulignent qu’ils affirment leur « engagement à construire un ordre politique et un système de gouvernement inspirés des réalités du pays et fondés sur les valeurs de justice, de démocratie, de bonne gouvernance, de pluralisme, de respect des libertés et droits fondamentaux de l’individu… » (Accord d’Arusha, protocole 2, alinéas 1 et 2 du préambule).

Nous nous intéressons exclusivement au deuxième protocole consacré aux libertés/ droits fondamentaux, à la démocratie et à la bonne gouvernance. Ce protocole est formé de deux chapitres. Le premier élabore les « principes constitutionnels de la constitution post-transition » et le second met en place les arrangements qui devaient guider la transition. La question des droits de l’homme est débattue dans le premier chapitre, article trois intitulé « Charte des droits fondamentaux ». Cet article, d’une part, fait état des droits civiques et politiques dont doit jouir tout citoyen burundais ; d’autre part, il nous renseigne sur les instruments juridiques internationaux et régionaux des droits de l’homme intégrés plus tard dans « la Constitution de la République du Burundi », et dont aucune restriction ou dérogation n’est acceptable en dehors des dispositions prévues par la loi. (Accord d’Arusha, article 3, alinéa 1).

Le premier chapitre du deuxième protocole concerne donc les principes sur lesquels la constitution de la période post-transition a été fondée. Aussi est-il nécessaire de voir si la charte des droits fondamentaux de l’Accord d’Arusha a servi réellement de base à l’élaboration de la Constitution du Burundi post-conflit.

Une comparaison rapide montre quelques légères modifications et plus d’explicitations des droits civiques et politiques (Accord d’Arusha : art. 21-45 ; 47-51) ; la constitution, quant à elle, mentionne nommément les droits économiques, sociaux et culturels (art. 52-58), et ceux de l’enfant (art. 44-46). Il n’y a cependant pas d’articles spécifiques sur les droits de la femme, mais on se réjouit que la constitution aussi endosse les instruments juridiques du droit international des droits de l’homme comme l’avait fait l’Accord d’Arusha (Protocole 2, art. 17, alinéa 10). 

Ce qui frappe, par contre, c’est la longue liste des devoirs qui n’avaient pas eu une grande attention dans l’Accord d’Arusha. En effet, à part les points 24-25 de l’article trois, protocole 2 de l’Accord, nul autre point n’y parle de devoir, alors que la constitution leur consacre plus de dix articles (art. 62-74). Souvenons-nous que l’émergence du paradigme moderne des droits de l’homme en Occident est née de l’émancipation des droits naturels de leur liaison au devoir. Les droits de l’homme ne sont plus conditionnés par quoi que ce soit, puisqu’ils sont fondés sur le fait d’être humain et rien d’autre. Ils ne sont pas une récompense d’une prestation quelconque, et moins encore sont-ils corrélés aux devoirs quelconques. 

Cette absolutisation des droits de l’homme, dont l’origine se situe dans la philosophie libérale, a fait objet de débats houleux entre les différentes conceptions du paradigme contemporain des droits de l’homme. Consulté par l’UNESCO au siècle dernier, Mahatma Gandhi faisait déjà remarquer qu’il ne fallait pas énoncer les droits de l’homme qui ne comportent pas des devoirs. Ce fut également l’observation faite par les Africains sur les droits de l’homme. Ainsi, pour la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, le sujet des droits, qui est aussi un sujet des devoirs (art. 27-29), n’est pas simplement un individu, mais également tout un peuple. S’inscrivant dans cette philosophie des droits de l’homme, la constitution du Burundi statue non seulement sur les droits du citoyen, mais aussi leur caractère consubstantialité avec les devoirs. 

L’analyse faite de la charte des droits aussi bien dans l’Accord que dans la constitution soulève la question ci-après : l’inscription de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples dans les textes juridiques et légaux du Burundi a-t-elle permis aux citoyens de ce pays d’en jouir et de vivre réellement dans un Etat de droit ? Est-ce que la Charte a assuré au Burundi sa légitimité ? Lui a-t-elle servi de base pour sa coopération internationale ou encore d’outil de résistance contre l’oppression et la contestation de l’autorité ? 

Il est incontestable que cette charte et les principes du protocole II consignés après dans la constitution post-transition ont jeté une base solide de construction d’une société paisible et réconciliée conformément à la philosophie sociale de l’Accord d’Arusha. De ce point de vue, les inscrire dans les textes légaux nationaux a été le premier pas posé sur la voie de légitimation des institutions (politiques, économiques, sociales  et sécuritaires) issues de l’Accord d’Arusha. 

Cette base locale doit être articulée à la coopération internationale. En effet, le Burundi ayant adhéré à la plupart des instruments juridiques du droit international, les ayant intégrés dans sa loi fondamentale, il s’engageait ainsi, au niveau international et régional, à honorer ses engagements en matière du respect et de la protection des droits de l’homme. Aussi pouvons-nous soutenir que le code des droits de l’homme de l’Accord d’Arusha a permis au Burundi de s’assurer de sa coopération avec les autres nations. 

De plus, dans son projet de création d’un Etat de droit au Burundi, l’Accord d’Arusha a permis la naissance d’une société civile engagée dans la lutte contre la violation des droits de l’homme. Car, comme le fait remarquer Eva Palmans, « avec la signature de l’Accord, la société civile a connu une renaissance. (Et) jusqu’aujourd’hui, elle ne fait que se développer de façon quantitative mais aussi qualitative ». (2006 :210). Partageant le point de vue identique, Stijn de Reu atteste que la signature de l’Accord d’Arusha a vu une montée exponentielle de la création des associations engagées dans des différents domaines de promotion et protection des droits de l’homme. (2004:2). Au total, l’adoption d’une charte des droits de l’homme dans l’Accord d’Arusha et la constitution a généré une société civile engagée dans la protection des droits.

Ce qui précède soulève toutefois la question de l’effet concret des droits de l’homme sur les populations burundaises. Telle que formulée, la question exigerait une étude empirique pour mesurer l’impact de la charte des droits de l’homme de l’Accord d’Arusha sur le vécu des citoyens burundais; ce qui sortirait cette étude de son champ d’investigation consacré essentiellement à la réflexion sur la charte des droits de l’homme de l’Accord d’Arusha. Nous pouvons néanmoins relever, depuis la signature de l’accord jusqu’à la crise de 2015, quelques améliorations en termes de droits de l’homme. Citons à titre d’illustration, le cessez-le-feu avec les groupes rebelles, qui a certainement allégé les souffrances des Burundais et amélioré la situation des droits de l’homme. Il y a eu la mise en place des institutions politiques issues des élections, quelques fois contestées certes, mais des élections tout de même. Ce cadre institutionnel a permis aux citoyens, quoique difficilement, d’exercer leurs droits politiques et civiques. Il faut également noter la création de la Commission Nationale Indépendante des droits de l’homme qui, on le sait, n’a toujours pas fait l’unanimité sur ses prestations. Faisons mention également de l’amélioration de la liberté d’expression et de la presse, des associations et d’opinion. Dans le secteur de l’éducation, de la santé et du secteur social, il sied de mentionner des mesures prises pour favoriser l’éducation pour tous, la protection de la santé des mères et des enfants, le rapatriement des réfugiés.

En somme, grâce à l’Accord d’Arusha, un cadre propice à la promotion, la protection et le respect des droits de l’homme était en train d’être édifié. Mais cela était-il suffisant ? Je débats de cette question dans le point ci-dessous porté sur la maximisation de la jouissance des droits de l’homme.

  1. Une synergie pour l’effectivité des droits de l’homme

Un des paradoxes du mouvement des droits de l’homme contemporain est qu’il s’est intégré dans le système du droit international dont l’élément clé est l’Etat, alors que ce dernier constitue la menace redoutable contre les droits de l’homme. Comme indiqué dans le premier point, les droits de l’homme contemporains sont la conséquence des horreurs commises dans la deuxième guerre mondiale, et dont la plupart des Etats étaient responsables. Comment l’auteur des graves violations des droits de l’homme pourrait-il être en même temps leur gardien et protecteur ? Cela dénote la contradiction opérant à l’intérieur du régime contemporain des droits de l’homme, et de laquelle la charte des droits de l’homme, fondement de l’Accord d’Arusha et la Loi fondamentale, n’est pas épargnée.

Une objection peut être faite ici, arguant que le droit international contemporain commence avec la mise en place d’une organisation des Nations Unies, supra-étatique, et par conséquent, capable d’intervenir partout en cas de violation des droits de l’homme. Certes, l’objection paraît robuste, mais l’on ne doit pas oublier que le Conseil de sécurité et les autres institutions onusiennes chargés de faire respecter et protéger des droits de l’homme sont composés des Etats. Ceux-ci peuvent privilégier les intérêts politiques et les affinités bilatérales au détriment des droits de l’homme. De plus, comme nous le fait remarquer Habermas, les Nations Unies n’ont pas de police à portée de main prête à intervenir quand il y a nécessité. Elles dépendent du bon vouloir des Etats qui peuvent ou non fournir les moyens humains et matériels pour réaliser ses missions. Ce qui soulève la question de la gestion de la souveraineté des Etats et l’impérative protection des droits de l’homme. 

Par ailleurs, même si les Etats ont la volonté politique de protéger et respecter les droits humains, avec l’éclatement de l’Etat-nation et l’interconnexion du globe, ils font face aux menaces dont les causes souvent extérieures les rendent incapables d’action. Par exemple, le réchauffement climatique peut avoir des conséquences néfastes sur le respect et la protection des droits économiques et sociaux auxquelles aucun pays à lui seul ne peut apporter des réponses efficaces. Tel est aussi le cas des multinationales dont les effets meurtriers sur les droits des citoyens sont souvent avérés et auxquels aucune action gouvernementale ne peut s’opposer efficacement toute seule. 

Aussi faut-il penser à une synergie d’acteurs engagés dans la protection des droits humains, plutôt que de compter seulement sur l’Etat qui est soit complice et cause des violations des droits de l’homme, soit peu soucieux de leur protection, ou alors tout simplement incapable. Une telle synergie comporterait six éléments. En premier lieu, il y aurait les bénéficiaires des droits de l’homme. Ce sont les citoyens d’un Etat. Ils doivent être les premiers à revendiquer leurs droits et utiliser le texte des droits de l’homme pour réexaminer les pratiques politiques et culturels de leur pays. Nous retrouvons ici la première fonction des droits de l’homme depuis les Lumières : offrir une base de légitimation du gouvernement et donner au citoyen un outil de contestation de l’autorité illégitime. Dès lors, cette dernière est sommée de s’expliquer sur les cas des violations des droits de l’homme, faute de quoi elle se délégitime davantage. Ainsi, comme premiers bénéficiaires des droits de l’homme, les citoyens doivent être pionniers dans le combat pour leur respect et leur protection

Mais, la majorité d’entre eux n’étant pas familière avec les textes des droits de l’homme, il faut leur joindre la deuxième catégorie d’acteurs dont le rôle est irremplaçable. Ce sont les activistes locaux non-étatiques des droits de l’homme. Citoyens, ils sont touchés comme tout le monde par le non-respect des droits de l’homme dans leurs pays respectifs. Instruits, ils maîtrisent le langage des droits de l’homme, grâce à quoi ils jouent le rôle d’interprète et de traducteur dudit langage auprès de la majorité des citoyens. Ainsi, grâce au travail des activistes locaux, les citoyens prennent conscience de leurs droits et se dotent des moyens de les revendiquer. 

Outre ce rôle d’interprétation et de traduction, les activistes locaux (i) informent les autres citoyens sur les stratégies et les processus à suivre pour réclamer leurs droits ; (ii) jouent le rôle de sensibilisation des citoyens et des autorités sur les menaces qui encourent les droits de l’homme ; (iii) font la plaidoirie auprès des institutions nationales, régionales et internationales engagées dans la défense des droits de l’homme pour contribuer à leur amélioration

L’Etat et des institutions mixtes constituent le troisième type d’acteur. Par institutions mixtes, j’entends les institutions dites indépendantes établies par les gouvernements pour veiller au respect et à la promotion des droits de l’homme. C’est notamment le cas des commissions nationales indépendantes des droits de l’homme. Leur caractère mixte consiste en ce que, bien que travaillant sous l’autorité de l’Etat, elles se considèrent indépendantes et médiatrices entre le gouvernement et la société civile. Ainsi, le rôle qu’ils jouent est ambigu et difficile à circonscrire. Elles sont supposées jouer le rôle de médiatrices pour départager les deux « protagonistes » en cas de crise, mais en même temps elles se trouvent presque sous la houlette de l’un de deux, à savoir l’Etat. 

Le rôle de l’Etat dans la protection ou non des droits de l’homme est indéniable. En effet, en tant que sujet du droit international, l’Etat est le seul qui engage la nation au niveau national et international, en signant et ratifiant les pactes et conventions qui instituent les droits de l’homme. C’est aussi l’Etat qui doit mettre en place les mécanismes de promotion et de protection des droits de l’homme. Pour les raisons évoquées ci-dessus, la seule approche légaliste ne permet pas de faire l’analyse suffisante et effective de la question des droits de l’homme. Elle doit, par conséquent, être complétée par d’autres approches qu’incarnent divers autres acteurs engagés dans la lutte contre la violation des droits de l’homme. 

Ces autres acteurs sont les activistes non-gouvernementaux de l’extérieur, les organisations régionales et la communauté internationale. Les activistes non-gouvernementaux de l’extérieur sont ceux des organisations civiles non-gouvernementales d’autres pays —elles peuvent être nationales, régionales ou internationales —qui peuvent aider dans la plaidoirie et la médiatisation de la situation des droits de l’homme dans un pays donné. En coordination avec les activistes locaux du pays concerné, ils arrivent à mettre la pression sur le gouvernement ou autre institution qui menace ou ne protège pas les droits de l’homme. Et par organisations régionales et la communauté internationale, j’entends celles créées par les Etats aussi bien au niveau régional —par exemple CEA, UA, UE, etc. –qu’au niveau international —par exemple HCR, ONU, etc.. Ces acteurs participent à l’amélioration des droits de l’homme dans un pays donné, mais il faut toujours qu’ils soient en coordination avec les bénéficiaires et les activistes locaux qui assument la lutte pour les droits de l’homme, afin d’éviter la rhétorique colonialiste et impérialiste souvent adressée au mouvement des droits de l’homme.  

Schématiquement, nous avons la synergie qui se présente comme suit : 

Image retirée. IC représente la communauté internationale, RB : organisations régionales, SMI : l’Etat et les Institutions mixtes, Benfs : Bénéficiaires, INSA : les acteurs internationaux non-gouvernementaux ; et LNSA : les activistes locaux non-gouvernementaux. Les flèches en ligne continue montrent une coopération assidue et une influence réelle entre les différents acteurs, tandis que les flèches en tirets signifient que l’influence est éventuelle. Les autres flèches en pointillés et tirets montrent une relation minimale et par conséquent une influence limitée. (Ingiyimbere 2017 : 247). 

Comme nous le disions tantôt, les acteurs locaux non-gouvernementaux sont au centre de ce travail des droits de l’homme parce que ce sont eux qui mobilisent les citoyens, mettent la pression sur l’Etat et les institutions mixtes, contactent les acteurs externes, notamment les autres activistes, les institutions régionales et internationales, afin d’influer sur l’action de l’Etat et des institutions étatiques impliquées dans la promotion, la protection et  la réalisation des droits de l’homme. De fait, les citoyens, qui sont les premiers à combattre la violation des droits de l’homme, restent également les premières victimes de la répression de l’Etat contre toute contestation. Et pourtant, sans eux, il est peu probable que l’Etat, considéré comme prédateur  des droits de l’homme, se transforme en gardien. 

La question des droits de l’homme est débattue dans l’Accord d’Arusha autour d’une charte dont la mise en application reste un défi énorme. Quelle peut en être l’explication ? En effet, la charte se trouve dans un accord politique qui pose la problématique du statut juridique de la protection des droits de l’homme (Mambo 2012: 930) et de la possible préséance du compromis politique sur les normes de ces derniers. C’est la raison pour laquelle, la synergie ci-dessus expliquée est indispensable dans la réalisation, promotion et protection des droits de l’homme. Dans ce vaste projet, les citoyens burundais doivent jouer le rôle de premier plan. Cela exige la formation d’une société civile engagée résolument dans le combat contre la violation des droits de l’homme. Ces deux acteurs doivent collaborer avec l’Etat et la CNIDH en veillant au respect de leurs engagements internationaux en matière des droits de l’homme. La lutte pour la protection et promotion des droits de l’homme menée par les acteurs externes (notamment non-gouvernementaux) n’aura d’effet que si les bénéficiaires, c’est-à-dire les citoyens burundais, sont conscients de l’ultime urgence de barrer la route à tous les prédateurs des droits de l’homme. Les premiers à être surveillés -l’Etat et ses multiples institutions-  tireront désormais leur légitimité du respect et de la protection des droits de l’homme au Burundi. Faute de quoi la charte de l’Accord d’Arusha restera sans morsure sur la situation politique du pays et sera une promesse non-tenue. 

  1. En guise de conclusion : Droits de l’homme et bonne gouvernance

Les droits de l’homme dans l’Accord d’Arusha sont évoqués dans le protocole II, dans lequel les droits de l’homme font corps avec la thématique de la démocratie et bonne gouvernance. Toutefois, si la démocratie fait bon ménage avec les droits de l’homme (puisque la DUDH mentionne la participation dans la gestion du pays comme un droit, art. 19-22), il n’en est pas de même pour la bonne gouvernance. 

De fait, quoique très couramment utilisée aujourd’hui en politique, la notion de bonne gouvernance est d’origine économique, spécialement de la gestion des entreprises, et ce n’est que tardivement qu’elle entre dans la gouvernance politique. (Bakkour 2013:14). Elle fut d’abord utilisée dans la restructuration des entreprises américaines en mettant en place des mécanismes pour assurer la surveillance et la transparence dans la gestion de l’entreprise. Or, ce modèle économique s’est inspiré du néolibéralisme qui vise l’efficacité et le rendement, sans nécessairement se soucier de l’impact de l’économique sur des droits économiques et sociaux. De plus, cette importation du néolibéralisme économique en politique met l’Etat sous tutelle du secteur privé et fait de lui dépendant de la logique du profit. Comme l’écrit Tino Raphaël Toupane, « l’apologie du néolibéralisme et des vertus du marché sous-jacente à la notion de gouvernance valorise de manière naïve les autres acteurs en dehors de l’Etat et les vertus du secteur privé ». (Toupane 2009:105).

Prise dans ce sens, la « bonne gouvernance » peut être une menace pour une certaine catégorie des droits de l’homme. Ainsi, il ne suffit pas, comme le proposent la plupart des institutions, de remplir les critères de la bonne gouvernance pour que tous les droits de l’homme soient nécessairement respectés et promus. Si certains d’entre eux peuvent l’être (notamment ceux relatifs à l’expression et à la participation), d’autres ne le sont pas nécessairement à cause de l’idéal recherché par la bonne gouvernance : la poursuite effrénée de rendement et d’efficacité dans l’entreprise. 

C’est pourquoi, pour y faire face,  les droits de l’homme doivent jouer leur rôle de contestation et de légitimation. C’est ce même rôle qui est reconnu à la charte des droits fondamentaux de l’Accord d’Arusha et la Loi fondamentale, dont le projet sociétal est d’édifier une communauté politique paisible et réconciliée, où les libertés et droits de chacun sont promus et respectés.



 

Bibliographie

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